Patron de ses rêves ?


Jean-Pierre Guillon
Paris IXème -- France



Rêve du 21/12/96 au matin : 7 H 45/8 H
Noté immédiatement après le réveil

Je suis dans un navire en direction ds USA, et nous sommes très nombreux. Ce navire est une grande maison en pierres de taille et linteaux de granit, sans charpente, sans toit, sans plancher, sans boiseries. Elle doit peser un bon poids et malgré sa forme rectangulaire et l'absence de coque, elle flotte néanmoins au gré des courants. Tout le monde marche sur les vagues, comme si la mer était un vrai plancher. Certains dansent même sur «le pont».

Avec un seul yaourt qu'elle mélange à je ne sais quel liquide, une femme réussit à préparer une pleine bassine de «crème fouettée» pour les passagers, qui en redemandent. Le reste est jeté à la mer par une fenêtre de la maison, se répand sur l'eau et flotte à la surface, à quelques centimères seulement de la ligne de flottaison. Pour en récupérer un peu, car je ne peux atteindre avec la main la couche de crème, je vais nettoyer - dans ce qui a dû être autrefois une cuisine -, une grand louche en argent.

La nappe de crème nous entoure toujours; elle est très épaisse, mais au fur et à mesure que le bateau avance, elle devient quand même plus dispersée. Pour passer le temps, mais sans quitter le «navire», des gens plongent dans l'eau et font «la planche». Parmi la foule des nageurs, passent des hommes, des femmes avec landaux et poussettes, des enfants; d'autres vont se promener aux environs des falaises d'Argol toutes proches, dont les roches coupantes surgissent parfois à fleur d'eau. Mais on voit là-bas de beaux oiseaux exotiques, aux couleurs vives, inconnus dans nos régions, et leur chant attire les voyageurs.

Sur le bateau, on se livre maintenant à des activités diverses, dont une danse «gavrotte» à 30 participants, où je retrouve mon vieil ami Ménez [Ménez en Breton signifie «Montagne»] ventripotent et fumant cigare. Il ressemble à Orson Wells et raconte une histoire interminable qu'on n'écoute plus sur la fin que par politesse : l'histoire de trente enfants sur un navire en perdition et qui disparaissent mystérieusement les uns après les autres. Un jour, il ne reste plus que deux petits mignons enrubannés : une gamine blanche et un jeune métis. Une question se pose : qui mangera l'autre, comme dans la ritournelle ? Mais lorsque le bateau atteint la côte, il n'y a plus personne à bord : ni gamin, ni gamine ! Qu'est-ce qui a bien pu se passer ?

Ménez propose de réunir près de lui tous les enfants aujourd'hui présents et de reprendre la scène avec une nouvelle équipe, mais personne n'accepte de se livrer à l'expérience...

Les adultes surtout refusent de confier leurs enfants au jeu du Père Ménez. Comme lui et moi ne nous sommes pas vus depuis des années, je lui annonce que ma femme est décédée brusquement d'un cancer, il y a quelque temps. Mais quand il apprend que je vis maintenant avec sa cousine, il se met à me plaindre : «Dans quel guêpier tu t'es mis, mon pauvre ! Tu ne le sais pas ? Elle est complètement folle ! - Je sais, je sais; ça ne me changera pas !»

Ma mère est présente, elle aussi, parmi les naufragés, et me rappelle alors une étrange histoire qu'elle situe vers mes 4 ou 5 ans. Cela se passe en Mayenne, au sud de Laval, dans un endroit peu accueillant, le plus écarté et le plus désolé du département. Elle m'y conduit, pour qu'on se remette les lieux, et on arrive ainsi près d'un immense moulin en ruine jouxtant une maison d'habitation ravagée par l'incendie, toute calcinée, et dont il ne reste plus que les quatre murs. Une fenêtre aveugle du premier étage est encore toute noire de fumée : dans la région, on l'a baptisée «la fenêtre aux Oies». Criblé de dettes, en effet, le meunier (un ami de mes parents) aurait tué une nuit, dans leur sommeil, femme et>enfants, mis le feu à la maison et se serait jeté dans le vide du haut de cette fenêtre.

Tout cela est si vieux. «Mais tu dois t'en souvenir quand même, voyons !, me dit ma mère. Nous allions souvent chez lui à l'époque, et il y avait un élevage d'oies tout près du moulin !»





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